Erica Baum photographie depuis le milieu des années 1990 des fragments de mots et d’images trouvés dans des journaux et des livres, des salles de classe et des bibliothèques. Capturés, recadrés, agrandis, extraits de leurs contextes, les mots photographiés deviennent portraits et paysages, compositions abstraites de signes linguistiques et typographiques, révélant l’étrangeté et le caractère poétique involontaire des systèmes de données desquels ils sont tirés. Dans l’exposition sont réunies des œuvres issues de trois séries distinctes : Card Catalogues (1994 – 1998), Frick (1998) et Dog Ear (2009 – en cours).
Les œuvres de la série Frick isolent en les agrandissant certains mots-clés des notices de bibliothèque de la collection Frick à New York, parfois agrémentés d’écritures manuscrites, pour leur conférer une valeur d’image tout en révélant parfois les traces d’une activité humaine ouvrant une brèche dans un système mécanique. La colonne de guillemets de Untitled (Nude figures), 1998, peut-elle ainsi évoquer des empreintes de pas laissées par ces « silhouettes nues » ou la répétition des mots manuscrits de Untitled (Squirrels Flying), 1998 renvoyer à un étrange mantra. Entre texte et image, poésie et photographie, dans les œuvres de la série Dog Ear, (Ecorner en français), des pages de livres cornées sont photographiées de manière à délimiter de petits carrés de textes scindés par la diagonale du pli, offrant alors une lecture poétique non-linéaire. Composées de détails de répertoires de fichiers, les œuvres de la série Card Catalogues, forment enfin les chapitres d’un atlas débusquant l’aléatoire des systèmes de transmission et de référencement de l’information. Dans les combinaisons apparemment fortuites de ces oeuvres, le langage apparaît selon un angle distancié, détaché du sens qu’il convie habituellement pour apparaître sous un aspect plus formel, à la manière de haïkus japonais.