Les paroles « Time to leave the capsule… if you dare », extraites de la chanson Space Oddity de David Bowie, ont été utilisées par la BBC comme bande-son pour accompagner en direct les premiers pas de Neil Armstrong sur la Lune, le 20 juillet 1969. Elles interpellent d’entrée de jeu le visiteur pour l’inviter à un voyage hérité de l’imaginaire collectif de la conquête spatiale : «oserez-vous franchir le pas, sortir de votre “capsule”? ».
En convoquant des modes d’expérimentation proches de ceux des scientifiques ou en stimulant nos représentations inconscientes de l’espace, les oeuvres présentées dans l’exposition interrogent la place de nos croyances – et de nos capacités à discerner le vrai du faux – dans le champ de la connaissance. Entre récits d’anticipation dystopiques et remises en question de nos certitudes, elles nous incitent à porter un regard attentif sur les modes de diffusion de l’information, la mise en récit des images et les idéologies qui les sous-tendent. Que se passe-t-il lorsque les discours manquent ? Que se passe-t-il quand les événements scientifiques sont mis en fiction? Certaines oeuvres permettent une distanciation ironique ou loufoque. D’autres viennent au contraire rappeler une réalité sombre et inquiétante : celle de la destruction de la nature par l’homme dans son usage des technologies et son appétit dévastateur de conquête.
Dans une atmosphère teintée de mélancolie, l’exposition déploie une forme de « futur antérieur » dans la mesure où l’imaginaire scientifique s’y trouve paradoxalement convoqué par le biais d’une esthétique low-fi et de nos représentations passées. Les oeuvres n’évoquent pas moins des enjeux toujours contemporains, à la faveur d’un voyage temporel onirique. La projection, qui constitue un mode opératoire récurrent au sein de l’exposition, interroge plus largement les dispositifs d’illusions propres aux idéologies, tout en renvoyant à la technologie du cinéma qui a fortement contribué à la formation de notre imaginaire spatial.
Invité à s’immerger dans l’obscurité, le spectateur voit ses repères habituels perturbés. Un temps d’adaptation lui est nécessaire pour suivre le chemin tracé par les oeuvres, et ce bouleversement des sens est propice à un questionnement sur les données du réel. Les multiples discours déployés tout au long du parcours permettent au spectateur de créer des récits dans lesquels une autre réalité prend forme. D’abord plongé dans le doute, il devient finalement acteur de sa visite ; “éclairé” par les oeuvres, il accède alors à la possibilité d’une nouvelle compréhension du monde.
Le CEAAC, en lien avec les étudiantes du Master Critique-Essais, écritures de l’art contemporain de la Faculté des Arts de l’Université de Strasbourg, vous propose d’approfondir votre visite de l’exposition en écoutant les podcasts des oeuvres.
Ils sont à découvrir ici