Le CEAAC a développé un réseau de partenaires internationaux qui conduit chaque année à l’accueil et à l’envoi d’artistes en résidence. Il dispose également d’un espace d’exposition dédié à la présentation du travail des artistes qui participent à ces programmes d’échanges.
Depuis 2013, un nouveau partenariat s’est établi avec l’Institut Français de Prague et le centre culturel MeetFactory. Cette résidence croisée permet l’accueil d’un artiste tchèque à Strasbourg et l’envoi d’un artiste de la région à Prague. Adrien Giros & Jiri Thyn sont les premiers à avoir bénéficié de cet échange durant l’hiver 2013.
The guards
Adrien Giros utilise le son pour ses qualités esthétiques, physiques et psychologiques. Il s’intéresse aux phénomènes acoustiques et les réinterprètes à travers des sculptures, de la performance, des installations. Pendant son séjour à Prague, il a travaillé à partir des premières notes de l’opéra Don Giovanni de Mozart. Son installation présente une relique d’une mèche de cheveux du célèbre compositeur, réactivée par ce son et gardée par 4 figures fantomatiques.
Dans l’histoire de Don Giovanni, le personnage principal est à cheval entre plusieurs oppositions : celle de la stabilité et de l’instabilité, de la paix et de la peur, de la folie et de la sérénité, de la vie et de la mort. L’opéra lui-même est également étroitement liée à divers éléments d’un autre monde.
Dans cette installation, Adrien Giros ne travaille pas avec l’opéra comme avec un matériau déterminé et n’essaie pas simplement d’exploiter un opéra d’une nouvelle façon. Au contraire, sa fascination pour l’histoire, la musique et l’histoire que l’opéra et son auteur ont laissé à Prague est présente dans l’installation, d’une manière abstraite et mystique. Elle est traduite en sensations physiques fortes, induites par les fréquences de résonance de l’espace, de l’installation sonore, et les émotions psychosomatiques en profondeur mises en évidence par une atmosphère de temple des objets exposés.
Consciousness as a Fundamental Attribute I, II
Jiri Thyn est diplômé de l’atelier photographie sous la direction de Pavel Stecha à l’Académie des arts appliqués en 2006 et a également passé une année à l’Académie des Beaux-arts de Prague (studio de Vladimir Skrepl et Jiri Kovanda) et la UIAH à Helsinki.
Il a alors développé un travail hybride (photographie, vidéo, installations et interventions dans l’espace public) qu’il nomme «lyrisme conceptuel». À travers cette notion clé, Thyn évoque un dialogue entre le conscient et l’inconscient pictural.
Dans cette nouvelle série, l’artiste joue sur une ambivalence qu’on pourrait qualifier d’architecture destructrice. Il développe un travail sur l’imagerie contemporaine qui découle de son propre subconscient. L’ésthétisme des photographies est un point majeur de son travail, néanmoins celui-ci est perturbé par la découpe automatique, inconsciente, de l’image au couteau. Un paradoxe s’institue entre la beauté plastique de la photographie et l’attitude frénétique et impulsive que l’artiste entretient à l’égard de l’image. Cette technique de découpe, devenue par la suite mythique, qui en morcellant l’image la transforme en une somme d’éléments, a été opérée il y a de cela un siècle et a radicalement transformé notre lecture de l’image.
Thyn fait «performer» l’image dans laquelle il s’adonne à combiner son réemploi, ses résonances, ses oublis, ses lignes de fuites et en propose de nouvelles interprétations nostalgiques.
(…) Les clichés de Thyn n’ont pas pour ambition de communiquer mais de confronter, d’étonner et de briser l’harmonie, ce qui nous amène à une in-traductibilité du travail de l’artiste. La modernité est ici montrée par la mise en abstraction des faits sociaux et politiques présents sur l’image et celle-ci fonctionne comme un espéranto pictural (sorte de langage visuel universel. )