Dans ses installations et ses œuvres cinématographiques, Florine Leoni s’attache à explorer les formes d’expressions personnelles ainsi que les comportements interpersonnels en regard des arrangements spatiaux, sociaux, sociétaux et psychologiques.
Ce faisant, elle les exprime par le biais de protocoles expérimentaux et de stratégies artistiques spécifiques, de structures dérobées qui rendent les processus internes visibles, audibles et tangibles.
Dans son travail cinématographique le plus récent « Aysha Kevin Michele » ainsi que dans son projet de long métrage actuel, elle évoque la justification de notre être dans le champ de tension entre les normes sociales et sociétales , ouvrant ainsi des espaces de pensée et d’émotion autour des préoccupations existentielles et socio-politiques. »
L’oeuvre How close we are proposée par Sylvain Baumann et Florine Leoni se dresse, froide et menaçante, au milieu de l’espace d’exposition. Composée de grilles métalliques issues d’une friche industrielle, cette installation tridimensionnelle forme un objet architectural sévère et monotone dont l’opacité relative perturbe le regard et les repères de qui souhaiterait s’y aventurer. La piste sonore diffusée à l’intérieur de cette structure, laissant entendre le bruit de sa propre construction (ou déconstruction), confère à l’ensemble un caractère mouvant, inconfortable. Plaçant le spectateur dans une situation indéfinie, entre intérieur et extérieur, l’œuvre tend à se manifester comme un espace relationnel et de circulation, favorisant la dialectique entre espace mental et physique – conscience individuelle et collective. La rigueur de son matériau ordinaire et son apparente rigidité (sonore ou plastique) convoquent également l’esthétique d’espaces urbains en marge, friches industrielles ou zones grises banalisées et délaissées. Par son caractère anonyme, son état intermédiaire et solitaire, l’installation n’est pas sans rappeler l’hypothétique non-lieu [1] contemporain présenté par Marc Augé.
Dans son ambiguïté le titre How close we are résonne quant à lui comme une énigme : sa polysémie engage à la fois un rapport de proximité et d’humanité (« À quel point nous sommes proches »), mais aussi d’incomplétude (« On y est presque ») voire de danger (« Au bord de… »). Comme le formulent les artistes, « cet assemblage est à l’image d’un sentiment ; celui d’un espace desséché, où la consistance de l’air, de la lumière et des matériaux semble avoir perdue toute convivialité, et où la présence humaine, humide et grasse, ne serait tolérée que de passage ». Invitation à l’introspection et à l’imaginaire, l’œuvre interroge nos rapports sociaux autant qu’elle examine la façon dont nous habitons et pensons les espaces construits.
[1] Marc Augé, Non-lieux, introduction à une anthropologie de la surmodernité, La Librairie du XXIe siècle, Seuil, 1992
Florine Leoni est née en 1980 à Schlieren (Suisse). Elle vit et travaille à Bâle.